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Ces « dérapages » qui font avancer

La vie professionnelle est rarement un long fleuve tranquille. A l’invitation du Business Club CVCI, de Genilem et du Master Innokick HES-SO, quatre personnalités aux parcours riches, notamment de leurs « chutes », se sont livrées lors d’une soirée consacrée à l’analyse de l’échec.

Mal vécus, perçus comme une honte, il semble compliqué d’être fier de ses échecs en Suisse. Si, dans la culture américaine, les flops jalonnant un curriculum sont considérés avec un certain respect, nous avons plus de difficulté à « positiver » nos accidents de parcours. Et si nous les envisagions comme partie intégrante d’un succès à venir? « Quand on mentionne de grands entrepreneurs ou innovateurs, tels Steve Jobs, Mark Zuckerberg ou, plus près de nous, Elmar Mock – co-inventeur de la Swatch -, on célèbre systématiquement leur réussite, sans mentionner leurs échecs », souligne Nathalie Nyffeler, responsable du Master Innokick et professeure à la HEIG-VD. Le temps d’une soirée, l’événement « Dérapage Contrôlé » a donc réuni des étudiants, des représentants du monde académique, des entrepreneurs et quatre orateurs venus partager leurs « dérapages ». Le propos? Parler d’échec et, par rebond, de la notion d’innovation nécessaire à toute évolution, qu’elle concerne l’humain, un projet, une entreprise ou une entité publique.

 

Parcours et témoignages

Vision d’un politique
Jean-François Clément, syndic de la ville de Renens, est revenu sur les élections de 2006 au cours desquelles, en tant que candidat à la syndicature, il avait été battu. Son récit, celui d’un projet politique et humain travaillé sur de longs mois, est fréquent en politique et proche du vécu de nombreux entrepreneurs. Envie de réussir, implication intense, recherche de la meilleure approche pour mener sa candidature… Un élément se démarque, le fait que, gagnant ou perdant, le résultat public est analysé et débattu dans la presse. L’exposé de cette fin de campagne, très simple, a laissé percevoir la force de sa personnalité, acceptant la victoire de son adversaire et assumant sa défaite. Jean-François Clément a d’ailleurs poursuivi son parcours politique et gagné les élections suivantes.

 

Vision d’une sportive
Pour Crystel Matthey, qui a démarré la compétition à l’âge de 7 ans, c’est tout un projet de vie qui s’est retrouvé chamboulé lors d’une course, en 2011. Jusque-là, elle était semi-professionnelle en course à pieds, parallèlement à un emploi de Project Analyst au sein d’une grande entreprise industrielle, à 80%. Elle nous a raconté l’évolution d’une blessure, qui aboutira à la fin abrupte de sa carrière dans la course à pieds, mais surtout, comment elle a réussi à ne pas se perdre, à éviter les répercussions dans sa sphère professionnelle ou privée. Ses réflexions, sa passion du sport et son tempérament d’athlète l’ont conduite à ne pas abandonner, à littéralement se « remettre en selle » en démarrant une carrière dans le cyclisme.

 

Vision d’un startupper
Titulaire d’un Bachelor de l’EPFL et d’un Master de l’EPFZ, Wiktor Bourée a mené des recherches académiques et scientifiques à l’international, et co-fondé Technis – start-up vaudoise active dans la commercialisation de sols connectés et intelligents – dont il est CEO. Il a su gérer différents projets, « naturellement ». Puis, le rythme s’est emballé. Toujours conscient de ses responsabilités, celui qui assumait sa thèse de doctorat et son statut de CEO s’est remis en question. Les courtes nuits auront été nombreuses, tant pour réfléchir au moins frustrant des choix, que pour respecter les échéances de la thèse et de Technis. Il ne s’agit pas ici d’échec au sens premier, mais du moment charnière où un choix s’impose. Dans son cas, la responsabilité du CEO l’a emporté sur le doctorat.

 

Vision d’un ingénieur
C’est presque sous la forme d’un one-man show que Frédéric Meuwly, directeur d’Actitudes Coaching, a décortiqué ce matin de janvier où il s’est réveillé dans une pièce inconnue, hospitalisé pour burn-out. Celui qui, avec son Doctorat en biotechnologie et son Master en génie chimique de l’EPFL, a toujours été cartésien et travailleur acharné, s’est retrouvé face à un médecin lui notifiant de se reposer pour récupérer de l’énorme fatigue qui lui était tombée dessus comme la foudre. Lui, qui gérait le développement de produits pharmaceutiques à l’international et dirigeait des équipes, a dû ralentir, vivre les phases d’un burn-out: décompensation, prise de conscience, récupération. Ce recul imposé lui a fait comprendre que sa carrière n’était plus compatible avec ses valeurs et aspirations. Son entreprise actuelle de coaching s’avère l’évolution de son expérience de l’épuisement professionnel.